|
XLVIII D'une chambre de l'Hôtel de Ville.
De l'Hôtel de Ville !... Ainsi j'y suis. Le trajet exécrable
est fait. La place est là, et au-dessous de la fenêtre
l'horrible peuple qui aboie, et m'attend, et rit. |
J'ai eu beau me roidir, beau me crisper, le coeur m'a failli. Quand
j'ai vu au-dessus des têtes ces deux bras rouges, avec leur
triangle noir au bout, dressés entre les deux lanternes
du quai, le coeur m'a failli. J'ai demandé à faire
une dernière déclaration. On m'a déposé ici,
et l'on est allé chercher quelque procureur du roi. Je l'attends,
c'est toujours cela de gagné. |
Voici. Trois heures sonnaient, on est venu m'avertir qu'il était
temps. J'ai tremblé, comme si j'eusse pensé à autre
chose depuis six heures,
depuis six semaines, depuis six mois. Cela m'a fait l'effet de
quelque chose d'inattendu. |
Ils m'ont fait traverser leurs corridors
et descendre leurs escaliers. Ils m'ont poussé entre deux guichets du rez-de-chaussée,
salle sombre, étroite, voûtée, à peine éclairée
d'un jour de pluie et de brouillard. Une chaise était au
milieu. Ils m'ont dit de m'asseoir ; je me suis assis. |
Il y avait près de la porte et le long des murs quelques
personnes debout, outre le prêtre et les gendarmes, et il
y avait aussi trois hommes.
Le premier, le plus grand, le plus vieux, était gras et
avait la face rouge. Il portait une redingote et un chapeau à trois
cornes déformé. C'était lui.
C'était le bourreau, le valet de la guillotine. Les deux
autres étaient ses valets, à lui. |
À peine assis, les deux autres se
sont approchés de moi, par-derrière, comme des chats,
puis tout à coup j'ai senti un froid d'acier dans mes cheveux
et les ciseaux ont grincé à mes oreilles.
Mes cheveux, coupés au hasard, tombaient par mèches
sur mes épaules, et l'homme au chapeau à trois cornes
les époussetait doucement avec sa grosse main. Autour, on parlait à voix basse. |
Il y avait un grand bruit au-dehors, comme un frémissement
qui ondulait dans l'air. J'ai cru d'abord que c'était la
rivière ; mais, à des rires qui éclataient,
j'ai reconnu que c'était la foule. |
Un jeune homme, près de la fenêtre, qui écrivait,
avec un crayon, sur un portefeuille, a demandé à un
des guichetiers comment s'appelait ce qu'on faisait là. |
-La toilette du condamné, a répondu l'autre. J'ai
compris que cela serait demain dans le journal. Tout à coup
l'un des valets m'a enlevé ma veste, et l'autre a pris mes deux mains qui pendaient, les a ramenées derrière
mon dos, et j'ai senti les noeuds d'une corde se rouler lentement
autour de mes poignets rapprochés. |
En même temps,
l'autre détachait ma cravate. Ma chemise de batiste, seul
lambeau qui me restât du moi d'autrefois, l'a fait en quelque
sorte hésiter un moment ; puis il s'est mis à en
couper le col. |
À cette précaution horrible, au saisissement de l'acier
qui touchait mon cou, mes coudes ont tressailli, et j'ai laissé échapper
un rugissement étouffé. La main de l'exécuteur
a tremblé. |
-Monsieur, m'a-t-il dit, pardon ! Est-ce que je vous ai fait mal
? Ces bourreaux sont des hommes très doux. La foule hurlait
plus haut au-dehors. |
Le gros homme au visage bourgeonné m'a
offert à respirer un mouchoir imbibé de vinaigre.
-Merci, lui ai-je dit de la voix la plus forte que j'ai pu, c'est
inutile ; je me trouve bien. Alors l'un d'eux s'est baissé et
m'a lié les deux pieds, au moyen d'une corde fine et lâche, qui ne me laissait à faire que
de petits pas. |
Cette corde est venue se rattacher à celle de mes mains. Puis
le gros homme a jeté la veste sur mon dos, et a noué les
manches ensemble sous mon menton. Ce qu'il y avait à faire
là était fait.
Alors le prêtre s'est approché avec son crucifix.
|
-Allons, mon fils, m'a-t-il dit. Les valets m'ont pris sous les
aisselles. Je me suis levé, j'ai marché.
Mes pas étaient mous et fléchissaient comme si j'avais
eu deux genoux à chaque jambe. |
En ce moment la porte extérieure s'est
ouverte à deux battants. Une clameur furieuse et l'air froid
et la lumière blanche ont fait irruption jusqu'à moi
dans l'ombre. |
Du fond du sombre guichet, j'ai vu brusquement tout à la
fois, à travers la pluie, les mille têtes hurlantes du peuple entassées pêle-mêle sur la rampe du
grand escalier du Palais; à droite, de plain-pied avec le
seuil, un rang de chevaux de gendarmes, dont la porte basse ne
me découvrait que les pieds de devant et les poitrails ;
en face, un détachement de soldats en bataille ; à gauche,
l'arrière d'une charrette, auquel s'appuyait une roide échelle.
|
Tableau hideux, bien encadré dans une porte de prison. C'est pour ce moment redouté que j'avais gardé mon
courage. J'ai fait trois pas, et j'ai paru sur le seuil du guichet.
-Le voilà ! le voilà ! a crié la foule. Il
sort ! enfin ! |
Et les plus près de moi battaient des mains.
Si fort qu'on aime un roi, ce serait moins de fête.
C'était une charrette ordinaire, avec un cheval étique,
et un charretier en sarrau bleu à dessins rouges, comme
ceux des maraîchers des environs de Bicêtre.
|
Le gros homme en chapeau à trois cornes est monté le
premier.
-Bonjour, monsieur Samson ! criaient des enfants pendus à des
grilles. Un valet l'a suivi. -Bravo, Mardi ! ont crié de
nouveau les enfants. Ils se sont assis tous deux sur la banquette
de devant. |
C'était mon tour. J'ai monté d'une allure
assez ferme. -Il va bien ! a dit une femme à côté des
gendarmes. Cet atroce éloge m'a donné du courage.
Le prêtre est venu se placer
auprès de moi. |
On m'avait assis sur la banquette de derrière,
le dos tourné au cheval. J'ai frémi de cette dernière
attention. Ils mettent de l'humanité là-dedans. |
J'ai voulu regarder
autour de moi. Gendarmes devant, gendarmes derrière ; puis
de la foule, de la foule, et de la foule ; une mer de têtes
sur la place.
Un piquet de gendarmerie à cheval m'attendait à la
porte de la grille du Palais. |
L'officier a donné l'ordre. La charrette et son
cortège se sont mis en mouvement, comme poussés en
avant par un hurlement de la populace. |
On a franchi la grille. Au moment où la charrette a tourné vers
le Pont-au-Change, la place a éclaté en bruit, du
pavé aux toits, et les ponts et les quais ont répondu à faire
un tremblement de terre. |
C'est là que le piquet qui attendait s'est rallié à l'escorte.
-Chapeaux bas ! chapeaux bas ! criaient mille bouches ensemble.
-Comme pour le roi. Alors j'ai ri horriblement aussi, moi, et j'ai
dit au prêtre : -Eux les chapeaux, moi la tête.
On allait au pas. |
Le quai aux Fleurs embaumait ; c'est jour de
marché. Les marchandes ont quitté leurs bouquets
pour moi.
Vis-à-vis, un peu avant la tour carrée qui fait le
coin du Palais, il y a des cabarets, dont les entresols étaient
pleins de spectateurs heureux de leurs belles places, surtout des
femmes. La journée doit être bonne pour les cabaretiers. |
On louait des tables, des chaises, des échafaudages, des
charrettes. Tout pliait de spectateurs. Des marchands de sang humain
criaient à tue-tête :
-Qui veut des places ? Une rage m'a pris contre ce peuple. J'ai
eu envie de leur crier : Qui veut la mienne ? |
Cependant la charrette
avançait. A chaque pas qu'elle faisait, la foule se démolissait derrière elle, et je la voyais de
mes yeux égarés qui s'allait reformer plus loin sur d'autres points de mon passage.
|
En entrant sur le Pont-au-Change, j'ai par hasard jeté les
yeux à ma droite en arrière. Mon regard s'est arrêté sur
l'autre quai, au-dessus des maisons, à une tour noire, isolée,
hérissée de sculptures, au sommet de laquelle je
voyais deux monstres de pierre assis de profil. Je ne sais pourquoi
j'ai demandé au prêtre ce que c'était que cette
tour.
-Saint-Jacques-la-Boucherie, a répondu le bourreau. |
J'ignore
comment cela se faisait ; dans la brume, et malgré la pluie
fine et blanche qui rayait l'air comme un réseau de fils
d'araignée, rien de ce qui se passait autour de moi ne m'a échappé.
Chacun de ces détails m'apportait sa torture. Les mots manquent
aux émotions. |
Vers le milieu de ce Pont-au-Change, si large
et si encombré que nous cheminions à grand'peine, l'horreur m'a pris violemment.
J'ai craint de défaillir, dernière vanité !
Alors je me suis étourdi moi-même pour être
aveugle et pour être sourd à tout, excepté au
prêtre, dont j'entendais à peine les paroles, entrecoupées
de rumeurs. |
J'ai pris le crucifix et je l'ai baisé. -Ayez pitié de
moi, ai-je dit, ô mon Dieu ! Et j'ai tâché de
m'abîmer dans cette pensée.
Mais chaque cahot de la dure charrette me secouait. Puis tout à coup
je me suis senti un grand froid. La pluie avait traversé mes
vêtements, et mouillait la peau de ma tête à travers
mes cheveux coupés et courts. |
-Vous tremblez de froid, mon fils ? m'a demandé le prêtre.
-Oui, ai-je répondu. Hélas ! pas seulement de froid.
Au détour du pont, des femmes m'ont plaint d'être
si jeune. |
Nous avons pris le fatal quai. Je commençais à ne
plus voir, à ne plus entendre. Toutes ces voix, toutes ces têtes aux fenêtres,
aux portes, aux grilles des boutiques, aux branches des lanternes
; ces spectateurs avides et cruels ; cette foule où tous
me connaissent et où je ne connais personne ; cette route
pavée et murée de visages humains... J'étais
ivre, stupide, insensé. |
C'est une chose insupportable que
le poids de tant de regards appuyés sur vous. Je vacillais donc sur le banc, ne prêtant même plus
d'attention au
prêtre et au crucifix. |
Dans le tumulte qui m'enveloppait,
je ne distinguais plus les cris de pitié des cris de joie,
les rires des plaintes, les voix du bruit ; tout cela était
une rumeur qui résonnait dans ma tête comme dans un écho
de cuivre. |
Mes yeux lisaient machinalement les enseignes des boutiques. Une
fois, l'étrange curiosité me prit de tourner la tête
et de regarder vers quoi j'avançais. C'était une
dernière bravade de l'intelligence.
Mais le corps ne voulut pas ; ma nuque resta paralysée et
d'avance comme morte. |
J'entrevis seulement de côté, à ma
gauche, au-delà de la rivière, la tour de Notre-Dame, qui, vue de là, cache l'autre. C'est celle
où est le drapeau. Il y avait beaucoup de monde, et qui devait bien voir.
Et la charrette allait, allait, et les boutiques passaient, et
les enseignes se succédaient, écrites, peintes, dorées,
et la populace riait et trépignait dans la boue, et je me
laissais aller, comme à leurs rêves ceux qui sont
endormis. |
Tout à coup la série des boutiques qui occupait mes
yeux s'est coupée à l'angle d'une place ; la voix
de la foule est devenue plus vaste, plus glapissante, plus joyeuse
encore ; la charrette s'est arrêtée subitement, et
j'ai failli tomber la face sur les planches. Le prêtre m'a
soutenu. |
-Courage ! a-t-il murmuré. Alors on a apporté une échelle à l'arrière
de la charrette ; il m'a donné le bras, je suis descendu,
puis j'ai fait un pas, puis je me suis retourné pour en faire un autre, et je n'ai pu. |
Entre les deux lanternes
du quai, j'avais vu une chose sinistre. Oh ! c'était la
réalité ! Je me suis arrêté, comme chancelant
déjà du coup. -J'ai une dernière déclaration à faire
! ai-je crié faiblement.
On m'a monté ici. |
J'ai demandé qu'on me laissât écrire
mes dernières volontés. Ils m'ont délié les
mains, mais la corde est ici, toute prête, et le reste est
en bas. |
|
|
XLVIII Aus dem Hôtel de Ville! So bin ich dahin gekommen. Der schreckliche
Weg ist gemacht. Unten ist der Platz und unterhalb des Fensters bellt
die schreckliche Meute, wartet auf mich und lacht. |
Wie sehr ich mich auch zusammen nehme, mich beherrsche, das Herz
gehorchte mir nicht. Als ich über den Köpfen diese beiden
roten Arme sehe, mit der schwarzen Triangel am Ende, aufgestellt
zwischen zwei Laternen des Kais, verlor ich allen Mut. Ich verlangte
eine letzte Erklärung abzugeben. Daraufhin hatte man mich
hierher geführt und ließ nach dem königlichen Staatsanwalt
suchen. Ich wartete auf ihn. Das immerhin habe ich gewonnen. |
Hier der Bericht: Es schlug drei Uhr und man kam mir mitzuteilen, dass es Zeit wäre.
Ich zitterte, als hätte ich seit sechs Stunden, sechs Wochen,
sechs Monaten an etwas anderes gedacht. Es schien mir, als ob es
sich um etwas Unerwartetes handeln würde. |
Sie ließen mich durch ihre Korridore gehen und die Treppen
hinabsteigen, stießen mich durch zwei Pforten im Erdgeschoss,
eine düsterer Raum, eng, mit einer Wölbung, an diesem
nebligen Regentag kaum erleuchtet. Ein Stuhl befand sich in der
Mitte des Raumes. Ich setzte mich. |
In der Nähe der Tür entlang der Mauer standen einige
Leute, außer dem Priester und den Gendarmen, noch drei weitere
Personen.
Der erste, der Größte und Älteste, war fett, mit
einem roten Gesicht. Er trug einen Gehrock und einen zerbeulten
dreispitzigen Hut. Das war er.
Das war der Henker, der Knecht der Guillotine. Die zwei anderen
waren seine Knechte. |
Kaum saß ich, näherten sich mir die anderen zwei, von
hinten, wie Katzen, dann plötzlich, fühlte ich einen
kalten Stahl durch meine Haare gleiten und die Scheren knirschten
in meinen Ohren. Meine Haare, ohne System abgeschnitten, fielen
büschelweise auf meine Schultern, und der Mann mit dem dreispitzigen
Hut klopfte sie mit seiner groben Hand sanft ab.
Um uns herum sprach man mit leiser Stimme. |
Draußen hörte man einen gewaltigen Lärm, wie ein
Zitternd, dass durch die Luft schwingt. Ich glaubte zuerst es sei
der Fluss. Aber an dem ausbrechenden Gelächter erkannte ich,
dass es die Menge war. |
Ein junger Mann, in der Nähe des Fensters, der mit einem
Stift auf einem Blatt Papier schrieb, fragte einen der Gefängnishüter,
wie man das nenne, was man jetzt mit mir mache. |
„Die Toilette des Verurteilten“, antwortete der andere.
Mir war klar, dass dies morgen in der Zeitung stehen würde. Plötzlich zog mir einer der Knechte meine Weste aus, während
der andere meine herunterhängenden Hände nahm und sie
hinter meinem Rücken zusammenführte. Ich spürte
die Knoten eines Strickes, die sich langsam um meine aufeinanderliegenden
Handgelenke wickelten. |
Gleichzeitig löste der andere meine
Krawatte. Mein Hemd aus feinem Batist, das einzige, was mir von
meinem früheren ich noch verblieben war, hatte ihn einen Moment
zögern lassen. Dann machte er sich daran, dessen Kragen abzuschneiden. |
Bei dieser Vorsichtsmaßnahme, als das Eisen meinen Hals
berührte, erzitterten meine Ellbogen und es entfuhr mir ein
dumpfer Schrei.
Die Hand des Henkers erzitterte. |
„Mein Herr“, sagte er zu mir, „Verzeihung! Habe
ich Ihnen weh getan?“ Diese Henker sind sehr sanfte Menschen. Die Menge schrie noch lauter. |
Der grobschlächtige Mann mit dem pickeligen Gesicht bot mir
ein in Essig getränktes Taschentuch an.
„Danke“, sagt ich ihm mit der kräftigsten Stimme,
die mir zur Verfügung stand, „das ist nicht nötig,
es geht mir gut.“ Dann beugte sich einer von ihnen hinab und band mir, mit einem
dünnen Seil die Beine lose zusammen, so dass ich nur noch
mit kleinen Schritten voranschreiten konnte. |
Diese Schnur wurde
dann mit der meiner Arme verbunden. Dann warf der grobschlächtige Mann die Weste über meine
Schultern und verknüpfte die Ärmel unter meinem Kinn.
Das, was hier zu tun war, war getan. Der Priester näherte sich, mit seinem Kruzifix. |
„Es geht los“, mein Sohn, sagte er.
Die Knechte fassten mich unter die Achseln. Ich erhob mich, lief.
Meine Beine waren flau und bogen sich, ganz so als hätte ich
zwei Knie an jedem Bein. | In diesem Moment öffneten sich beide Flügel der Außentür.
Ein betäubender Lärm, die kalte Luft und das weiße
Licht drangen bis in die Tiefe des Zimmers, wo ich mich befand.
|
Aus der Dunkelheit des Schalters, sah ich plötzlich, durch
den Regen, die Tausend schreienden Köpfe der Menge, wirr zusammengepfercht
auf der Rampe der großen Treppe des Palastes. Rechts, auf
gleicher Höhe wie die Schwelle, eine Reihe Polizeipferde,
von denen ich durch die niedrige Tür nur die Vorderfüße
und die Brust sehen konnte. Gegenüber eine Abordnung von Soldaten
der Armee. Links, der hintere Teil einer Karre, an die eine steile
Leiter gelehnt war. |
Ein schreckliches Bild, wohl eingerahmt durch
die Tür eines Gefängnisses. Für diesen gefürchteten Moment hatte ich meinen ganzen
Mut aufbewahrt. Ich machte drei Schritte und gelangte an die Schwelle
der Pforte.
„Da ist er! Da ist er!“, schrie die Menge. „Er
kommt heraus! Endlich!“ |
Die, die mir am nächsten standen, klatschten in die Hände.
Egal wie groß die Verehrung, die man für einen König
empfindet, die Feier wird geringer sein.
Es war eine gewöhnliche Karre mit einem abgezehrten Gaul davor,
einem Kutscher in einem blauen Bauernkittel mit rotem Muster, wie
die der Gemüsehändler aus der Gegend von Bicêtre. |
Der grobschlächtige Mann mit dem dreispitzigen Hut stieg als
erster ein. „Hallo Herr Samson!“, schrieen die Kinder,
die an den Gittern hingen.
Ein Knecht folgte ihm.
„Bravo Mardi“, schrieen die Kinder.
Sie setzten sich beide auf die vordere Bank. |
Nun war ich an der Reihe. Ich stieg ein und versuchte Fassung
zu zeigen.
„Er macht sich gut!“, sagte eine Frau neben den Gendarmen. Dieses schreckliche Lob machte mir Mut. Der Priester kam und setzte
sich neben mich. |
Man hatte mich auf die hintere Bank gesetzt, den
Rücken dem Pferd zugewendet.
Diese letzte Aufmerksamkeit ließ mich erzittern.
Sie noch Menschlichkeit bei ihrem tun. | Ich wollte um mich schauen. Gendarme hinten, Gendarme vorne. Dann
die Menge, die Menge und die Menge. Ein Meer von Köpfen erfüllte
den Platz.
Ein Zug von Gendarmen zu Pferde erwartete mich am Tor des Gatters
des Palastes. |
Der Offizier gab Befehl. Die Karre und sein Gefolge setzten sich
in Marsch, wie als ob sie durch das Geschrei der Meute vorangetrieben
würden. |
Man überquerte das Gatter. In dem Moment, in dem sich die
Karre in Richtung des Pont – au Change bewegte, begann der
Platz zu toben, vom Pflaster bis zu den Dächern und die Brücken
und die Kais antworteten mit einem Erdbeben. |
In diesem Moment schloss
sich der Posten, der gewartet hatte, der Eskorte an.
„Runter mit dem Hut! Runter mit dem Hut!“, schrieen tausend
Stimmen. Als ob es der König wäre. Da entfuhr auch mir
ein schreckliches Lachen und ich sagte zu dem Priester:
„Ihren Hut, und meinen Kopf.“
Man ging im Schritttempo. | Das Kai mit den Blumenständen duftete. Es war Markttag. Die
Händler hatten ihre Blumensträuße meinetwegen verlassen.
Gegenüber, nur kurz vor der viereckigen Turm, der den Palast
flankiert, gab es Weinstuben, deren Zwischengeschosse mit angefüllt
waren mit Menschen, die sich über ihre schönen Plätze
freuten. Vor allem die Frauen. Das musste ein guter Tag für
die Schankwirte gewesen sein. |
Man mietete Tisches, Stühle,
Gerüste, Karren. Alles bog sich unter der Last der Zuschauer.
Händler , die mit menschlichem Blut handelten schrieen mit
aller Kraft:
„Wer sucht einen Platz?“. Wut gegen diese Meute ergriff
mich. Ich hatte Lust ihnen „wer will meinen“ zuzurufen. | Unterdessen bewegte sich die Karre voran. Mit jedem Schritt, denn
sie machte, begann die Menge den Platz hinter ihr aufzufüllen.
Mit meinen umherirrenden Augen sah ich, dass sie sich an anderen
Punkten meines Weges wieder neu formierte. |
Als wir auf der Brücke
Pont-au-Change ankamen, richtete ich meine Augen nach hinten rechts.
Mein Blick blieb an dem schwarzen Turm auf dem anderen Kai, der
die Häuser überragte hängen, isoliert, gespickt
mit Figuren, auf dessen Spitze ich zwei Monster aus Stein im Profil
sah. Ich weiß nicht warum ich den Priester fragte, was das
sei, da auf dem Turm.
„Saint – Jaques – la Boucherie“, antwortete
der Henker. | Ich weiß nicht, wie das zustande kam. In dem Nebeldunst
und trotz des feinen und weißen Regens der durch die Luft
fegte wie die Fäden eines Spinnennetzes, entging mir nichts
von dem, was um mich herum geschah. Jedes dieser Details brachte
seine Qualen. Die Gefühle zu beschreiben fehlen mir die Worte. | Etwa in der Mitte der Brücke Pont – au- Change, so
lang und so verstopft, dass wir kaum vorwärts kommen, erfasste
mich wieder das Grauen.
Ich fürchtete, ohnmächtig zu werden. Eine letzte Eitelkeit!
Ich benebelte mich selbst, um blind und taub zu sein, nichts mehr
zu sehen und zu hören außer dem Priester, dessen Worte,
durch den Lärm auseinandergerissen, ich kaum noch vernahm. |
Ich nahm das Kruzifix und küsste es.
„Gewähren Sie mir ihre Gnade“, sagte ich zu meinem
Gott! In diesen Gedanken versuchte ich mich zu versenken. Jede Erschütterung der harten Kutsche jedoch schüttelte
mich durch. Plötzlich durchrieselte mich ein Schauer. Der
Regen hatte meine Kleidung durchdrungen, Wasser war durch meine
abgeschnittenen und kurzen Haare gedrungen. |
„Sie zittern vor Kälte, mein Sohn?“ fragte mich
der Priester.
„Ja“, antwortete ich.
Aber nicht nur! Nicht nur aufgrund der Kälte. An der Biegung der Pont – au – Change bedauerten mich
die Frauen aufgrund meiner Jugend. |
Wir hatten den völlig falschen Kai erwischt. Ich sah nichts
mehr, verstand nichts mehr. All diese Stimmen, diese Köpfe
am Fenster, in den Türen, an den Gitter der Läden, an
den Laternen, all diese gierigen und grausamen Zuschauer. Diese
Menge, die mich kannte, ich aber niemanden. Diese gepflasterte
Straße, die wie von einer aus Gesichtern errichteten Mauer
gesäumt war… Ich war betrunken, abgestumpft, nicht
mehr bei Sinnen. |
Unerträglich ist das Gewicht so vieler auf
einen gerichteter Blicke. Ich schwankte auf meinem Sitz, achtete auch nicht mehr auf den
Priester und das Kruzifix. |
In dem Tumult, der mich umgab, unterschied ich nicht mehr zwischen
den Schreien des Mitleids und denen der Freude, unterschied nicht
mehr zwischen Lachen und Klagen, Stimmen und Lärm. All dass
war nur noch ein einziger Lärm, der in meinem Kopf dröhnte
wie in einem Resonanzraum aus Kupfer. |
Mechanisch lassen meine Augen
die Inschriften der Geschäfte. Einmal noch veranlasste mich die merkwürdige Neugierde den
Kopf zu drehen und in die Richtung zu schauen, in die ich mich
bewegte. Ein letztes Aufbäumen der Intelligenz. Aber der Körper
gehorchte nicht, mein Nacken war unbeweglich und schon vorher wie
tot. |
Seitlich, zu meiner Linken, jenseits des Flusses, erspähte
ich den Turm von Notre-Dame, der aus diesem Blickwinkel heraus
den anderen verdeckte. Jener Turm ist es, der beflaggt ist. Auch
dort waren viele Menschen, die wohl alles genau sahen.
Die Karre kam voran, voran und die Geschäfte zogen vorbei,
die Schilder, mit Schriftzügen versehen oder bemalt, vergoldet.
Die Meute lachte und stapfte im Schlamm. Ich ließ mich gehen,
wie es die Schlafenden tun, wenn sie träumen. | Plötzlich ward die Kette an Geschäften, an der meine
Augen haftete, an der Ecke eines Platzes unterbrochen, das Stimmengewirr
der Menge dehnte sich aus, kreischender, noch fröhlicher.
Plötzlich hielt die Kutsche. Ich wäre fast mit dem Gesicht
auf die Planken gefallen.
„Nur Mut!“, murmelte er. |
Man brachte nun eine Leiter ans Ende der Karre. Er gab mir den
Arm, ich stieg hinab, machte einen Schritt vorwärts, lehnte
mich zurück, um noch einen zu machen. Es war mir nicht möglich.
|
Zwischen den zwei Laternen des Kais hatte ich etwas unheilversprechendes
gesehen. Das ist die Wahrheit!
Ich blieb wie angewurzelt stehen, ganz so, als ob der Stoß mich
schon hätte wanken lassen.
„Ich möchte noch etwas sagen!“, schrie ich mit schwacher
Stimme.Man hat mich hierher gebracht. | Ich bat sie mir zu gewähren, meinen letzten Willen niederzuschreiben.
Sie lösten mir die Hände, aber der Strick ist noch da,
bereit, und der Rest ist unten. |
|